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L'Assurance Maladie
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Assurance maladie : vers une réforme inefficace et dangereuse pour l'usager
our l'UFC-Que Choisir, les effets d'annonce ne suffisent ni à combler « le trou de la Sécu » ni à assurer la sécurité des soins aux usagers. Ni aujourd'hui, ni surtout demain. Des exemples concrets :
- Déjà
inefficace financièrement : 1 euro par acte ou consultation ne résout rien
Au-delà d'une nouveauté spectaculaire, alors même que les
économistes mettent en doute l'efficacité et la finalité de la mesure, que
peuvent attendre concrètement les usagers d'une participation directe aux coûts
des soins ? Sûrement pas la fin du déficit de l'assurance maladie.
L'effort financier est-il justement réparti entre usagers et
entreprises ? Non. Les entreprises bénéficient de garanties offertes par la loi
dont les usagers sont privés !
Pour l'UFC-Que Choisir, la responsabilisation tant attendue
des usagers exige un préalable :
- l'égalité
de traitement de tous les acteurs : usagers, entreprises et professionnels de la
santé.
- Dangereuse pour la qualité des soins : la Haute Autorité
en santé muselée
Les attentes de l'UFC-Que Choisir vis-à-vis de la Haute
Autorité sont majeures. Elle a vocation à valider scientifiquement le panier de
soins pris en charge par la collectivité. Qualité des soins et bon usage de
l'argent public sont donc en jeu.
Pourtant, avant même sa mise en place, l'UFC-Que Choisir
doute de l'indépendance réelle d'un « gendarme de la santé » dont le financement
prête pour le moins à confusion... d'intérêts !
Le 29 juin s'ouvre à l'Assemblée Nationale le débat sur le
projet de réforme de l'assurance maladie. Les usagers ne se satisferont pas
d'une place « au coeur du système de soins ». Représentés par l'UFC-Que Choisir,
ils s'invitent au coeur de la réforme.
Assurance maladie : un euro, et après...
ui, dans tous les discours convenus, occupe le centre du système de soins? L'usager, bien sûr! Pourtant, à entendre certains décideurs politiques ou professionnels de la santé, il suffirait de responsabiliser - entendez punir - le même usager pour revenir à un âge d'or. Saisissons les mots : être responsable, pour nous c'est être actif. Et l'UFC-Que Choisir s'implique dans la vie du système de soins : contribution à la loi sur les droits des patients (dite loi Kouchner), membre du conseil d'administration de l'Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps), de conseils d'administration hospitaliers, de commissions régionales d'indemnisation et de conciliation (CRCI), présence dans les agences régionales d'hospitalisation, participation à l'élaboration des schémas régionaux d'organisation des soins (SROS), etc. Pour l'usager, être responsable c'est d'abord être informé. On reproche suffisamment aux usagers de se rendre trop aisément aux urgences hospitalières pour un bobo, de coûter cher et de saturer des services débordés. Mais qui donc avait informé cet usager qu'à seulement dix minutes à pied, un médecin libéral - pour autant qu'il existe dans cette zone déficitaire en généralistes - était de garde ce dimanche-là ? Personne !
L'usager connaissait-il alors un numéro d'appel unique
l'orientant instantanément vers la bonne destination ? Soyons clairs:
responsabiliser l'usager passe par un parcours de soins bien balisé et connu de
tous. On en est loin. Et puis, la douloureuse. À la hausse de la CSG
(contribution sociale généralisée) s'ajoute l'euro symbolique à chaque
consultation ou acte médical. Symbolique ? Pour l'instant, car il augmentera. Et
vite. L'UFC-Que Choisir n'est pas dupe. Pour preuve, le projet de loi de réforme
de l'assurance maladie fixe la participation des entreprises à une hausse, elle
symbolique, de 0,03 % de la contribution sociale de solidarité des sociétés
(C3S). Plus évasif quant aux usagers, le texte pose le principe du paiement à
chaque consultation, sans en définir le montant ! En clair : où est-il écrit «un
euro» ? Il est si facile de modifier un arrêté plutôt qu'une loi. Et de rendre
évolutif un euro si symbolique...
Il y a de quoi être inquiet de la dérive qui ainsi se
renforce encore davantage et consiste à assimiler le besoin de soins à un besoin
de consommation, à réguler celui-ci par une dissuasion qui serait le prix, avec
les risques, à terme, d'une médecine à l'accès fortement inégalitaire. Cette
mutation du patient en consommateur, ce basculement de la santé dans un schéma
de pure logique commerciale ne peut être source, à terme, que de ségrégation et
de régression sociale. L'occasion a donc été manquée de placer l'usager au coeur
du dispositif, en qualité de véritable acteur, et pas seulement de payeur.
Alain
Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
Assurance maladie : la réforme vue par l'UFC-Que Choisir
a demande en santé contient une forte composante de nécessité, voire de contrainte. Elle ne doit donc pas être assimilée à une demande classique de biens ou de services marchands.
La bonne
santé est un état de santé à un instant et nul n'est à l'abri d'avoir à
faire un jour appel à l'assurance maladie collective. On cotise donc aussi
pour soi. Cette prise de conscience du bénéfice individuel des bien portants
est essentielle pour favoriser l'acceptation du principe comme du montant des
prélèvements.
L'UFC-Que Choisir prend acte que le principe de solidarité
et d'universalité est clairement repris par le gouvernement actuel ainsi que
par l'ensemble des partenaires sociaux.
La réforme globale de l'assurance maladie est
indispensable. Elle ne saurait dépendre que d'un seul instrument. Les
questions de financement doivent être associées à l'organisation structurelle
des soins.
Pour L'UFC-Que Choisir l'offre de soins est régie par 5
principes directeurs :
- Une offre accessible géographiquement (garantie d'une
offre bien répartie) ;
- Une offre accessible économiquement (pas d'obstacle
financier excluant) ;
- Une offre garantissant la qualité des soins (évaluation
de tous les acteurs) ;
- Une offre assurant la continuité des soins (garantie de
la permanence) ;
- Une offre cohérente et lisible par la traçabilité de
toutes les étapes.
Afin d'atteindre ces objectifs, L'UFC-Que Choisir
s'implique en proposant la responsabilisation de tous les acteurs, à commencer
par celui qui justifie l'existence même du système de soins : l'usager.
La responsabilisation des usagers
Par la refonte des institutions dirigeantes
dans lesquelles il pourrait être acteur
L'UFC-Que Choisir a prouvé sa force de proposition et sa
volonté de s'investir dans le système de santé en participant à l'élaboration
de la loi sur les droits des patients et en étant présente à différents
niveaux de décision : SROS, ARH, CA des hôpitaux, CRCI...
L'UFC-Que Choisir rappelle que dans un cadre juridique
clair, c'est à la loi de définir avec précision la composition et les
attributions des futures institutions. Sans cette réforme en profondeur des
instances dirigeantes, l'UFC Que Choisir considère que toute réforme de
l'Assurance Maladie est vouée à l'échec. Si cette réforme donne à notre
association toute garantie de clarté dans les attributions (qui fait quoi) et
la possibilité pour les usagers de peser réellement sur les décisions, l'UFC
Que Choisir assumera ses responsabilités de représentant.
Par l'information
Pas de responsabilisation sans information. Le droit à
l'information des usagers constitue donc l'indispensable condition à leur
responsabilisation. La pertinence de l'offre n'a de sens que dès lors qu'elle
est connue et clairement perçue par les usagers. L'information directe ou par
services d'orientation téléphonique de l'usager constitue le premier maillon
d'une utilisation adéquate des ressources du système de santé. A l'inverse, «
monter en épingle » une porte d'entrée (ex. les urgences) aux dépens des
autres génère des goulets d'étranglement et des crises inutiles. La création
de maisons de soins assurant la permanence de l'accueil local pourrait être
une idée à encourager.
Un système de soins aux portes d'entrée et aux parcours
bien « balisés » :
- Sécurise usagers et professionnels ;
- En conséquence, implique l'usager et le professionnel
dans le respect des procédures.
Par l'incitation aux comportements de bonne
gestion de sa santé
La création au cours des premières années de vie d'un
parcours incitatif de soins sur la base d'objectifs de santé publique
constitue une phase de responsabilisation précoce des usagers. L'UFC-Que
Choisir considère avec intérêt les approches incitatives aux dépistages et
soins préventifs à l'image du modèle allemand de prise en charge totale des
actes de surveillance bucco-dentaires. Toutefois, ces parcours de soins
devront intégrer les exceptions découlant, à titre d'exemple, de la précarité
ou des migrations récentes.
Par
son implication financière
Le système actuel de participation financière n'est pas
satisfaisant car non ressenti comme tel par les usagers (prélèvements et
télétransmission). Avant de penser à les solliciter davantage par des moyens
divers (augmentation de la CSG, reste à charge sur chaque feuille maladie ou
boîte de médicaments...), il faut commencer par lui faire prendre conscience
de l'ampleur des prélèvements actuels (400 euros par mois pour un salaire
moyen de 1740 euros !). En tout état de cause, si de nouvelles mesures de
financement devaient être mises en place, elles ne sauraient intervenir sans
la mise en oeuvre simultanée des réformes de structures.
Par l'instauration de garde-fous contre le
nomadisme médical
L'UFC-Que Choisir considère que la collectivité finance
les soins et non le nomadisme médical, à distinguer d'un processus parfois
lent de diagnostic. Mais L'UFC-Que Choisir rappelle que les surcoûts des
«vrais nomades», sans explications ou justificatifs retrouvés, représentaient
1 pour mille du total des dépenses (1) et que son isolement ne saurait donc à
lui seul résoudre les difficultés financières de l'assurance maladie.
Responsabilisation des autres acteurs
Par un conventionnement citoyen
Par la facilité de remboursement des soins qu'il implique,
le conventionnement constitue un avantage direct que la collectivité offre à
l'usager ; mais c'est aussi un avantage direct au praticien en ce sens qu'il
est rarement dissociable de sa clientèle et donc de son activité et du revenu
qu'elle génère. Or, dans un contexte de déséquilibre de l'offre (déserts
sanitaires versus offre surabondante), L'UFC-Que Choisir considère qu'en
solvabilisant la clientèle du professionnel, la collectivité est en droit
d'attendre de l'avantage qu'elle offre des contreparties. Celles-ci peuvent
porter sur :
- le lieu d'implantation (éventuellement en association
avec des incitations) ;
- des exigences de formation initiale et continue ;
- l'appartenance à un secteur tarifaire donné ;
- une combinaison de différents critères en fonction de
l'offre et de la demande locale...
L'UFC-Que Choisir propose que le conventionnement
constitue l'un des instruments clef de la régulation de l'offre libérale en
santé. Demandé par le professionnel, il serait accordé sur la base de la
satisfaction à des critères d'intérêt général et local (déficit ou surnombre
de spécialistes déjà présents dans le bassin sanitaire). A contrario, le
professionnel qui renonce à tout ou partie des exigences liées au
conventionnement trouve une liberté plus large : une demande non-solvabilisée
par la collectivité, un risque donc plus élevé pour des revenus en
conséquence, soit un retour aux sources de l'activité libérale.
Par
l'évaluation et l'amélioration de la qualité du système
A l'heure actuelle, aucun acteur du système de santé (du
Ministère de la Santé aux professionnels, en passant par la CNAM et les
hôpitaux) ne fait l'objet d'une évaluation. Il faut remédier rapidement à
cette situation qui entraîne gaspillages (deux hôpitaux voisins peuvent avoir
la même activité avec 2 ou 7 spécialistes !), rentes de situation (carnet de
RDV plein sur plusieurs mois), dilution des responsabilités (quel service
ministériel devait alerter le Ministre de la Santé, lors de la canicule ?) et
manque de transparence (que connaît-on du financement public de l'Assurance
Maladie : non reversement de taxes sur l'alcool et le tabac, prélèvements pour
financement des 35 heures... ?) La création d'indicateurs pourrait être une
bonne chose, en sachant que tout ne peut être mesuré dans le domaine de la
santé.
La qualité des soins repose sur une formation initiale et
continue en adéquation avec l'évolution des techniques, des impératifs
économiques et des besoins humains.
La formation continue doit donc devenir un critère
d'évaluation concret du professionnel. Cette évaluation, il doit pouvoir s'en
prévaloir auprès des organismes d'évaluation et d'accréditation (ANAES), comme
de financement (CNAM, ARH...). Elle doit faire partie de l'équilibre du
contrat avec la collectivité.
Enfin, le professionnel doit pouvoir s'en prévaloir auprès
de ses patients. L'impossibilité actuelle engendre un « trou noir » dans le
circuit de l'information auquel l'UFC-Que Choisir ne trouve aucune
justification. C'est à l'usager d'intégrer - ou non - ce critère de choix dans
son mode d'élection du professionnel.
(1) Source : Faits Marquants 2003, Cnamts
ANAES : Agence Nationale d'Accréditation et d'Evaluation en Santé
ARH : Agence Régionale de l'Hospitalisation
CNAM : Caisse Nationale d'Assurance Maladie
CRCI : Commission Régionale de Conciliation et d'Indemnisation
HCAM : Haut Conseil pour l'avenir de l'Assurance Maladie
SROS : Schéma Régional d'Organisation Sanitaire
L'accès aux soins passe avant la liberté d'installation
des médecins libéraux
es usagers du système de santé ont besoin d'accéder aux soins sur l'ensemble du territoire. Pourtant, les professionnels libéraux de la santé disposent d'une totale liberté d'installation. Les critères d'installation ne correspondent ni aux besoins des usagers, ni aux impératifs de santé publique. Conséquences : déserts sanitaires, délais d'attente sans lien avec les besoins réels et urgents (jusqu'à des mois d'attente pour une consultation auprès d'un spécialiste). Dans certaines régions, il devient impossible de trouver un spécialiste conventionné de secteur I.
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