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Antoine Béclère 

Incroyable pénurie

de

 personnel à l'hôpital 

 

Sylvain Merle

Le Parisien , vendredi 27 février 2004

 

«C'EST LONG ! J'avais rendez-vous à 11 h 10 pour une simple prise de sang, s'impatiente Philippe.

Il est 13 heures et je ne suis toujours pas passé. »

 

« Il y a beaucoup trop d'attente,

c'est la folie !» s'emporte une patiente.

CLAMART, HIER MIDI. En sous-effectifs chroniques, l'ensemble du service des consultations de l'hôpital Antoine Béclère s'est mis en grève pour une durée illimitée.   (LP/SYLVAIN MERLE.)

Des retards habituels dans le service des consultations de l'hôpital Antoine Béclère, à Clamart, dont le personnel est en grève illimitée depuis mardi pour dénoncer le manque de personnel. « En grève, assignée », peut-on lire sur les blouses blanches qui continuent à s'activer. « On peut comprendre leur mouvement, pense pour sa part Jacques, un autre patient. Elles sont débordées, ça se voit. » « Cette situation est récurrente depuis deux ans et l'instauration des 35 heures, explique Marguerite *, infirmière du service. On est constamment en sous-effectif, mais nos problèmes ne semblent pas réellement intéresser la direction. » Complètement à bout, l'ensemble du service est aujourd'hui en grève. Un ensemble peu conséquent, puisque les infirmières ne sont que cinq au lieu de huit, cinq également pour les aides-soignantes alors que onze postes existent. Idem pour le poste d'agent hospitalier et celui du cadre responsable du service. Au total, ce sont presque 50 % des postes qui ne sont pas pourvus suite à des arrêts maladie ou des départs en retraite.


Plus de 300 heures à récupérer « On n'en peut plus, lance Michèle *, aide-soignante. La charge de travail est trop lourde, on fait des journées de plus de 12 heures d'affilée pour des semaines parfois de 55 heures. On accumule les heures sans pouvoir les récupérer. Au 31 décembre, j'avais 300 heures dues qui ne me seront jamais payées et que je ne peux pas prendre sans mettre mes collègues dans le pétrin. » Au-delà du sous-effectif chronique des consultations, c'est bien la qualité du service rendu aux quelque 2 000 patients annuels qui est aujourd'hui en cause. « Ces conditions de travail induisent une extrême fatigue, poursuit Michèle. On fait davantage d'erreurs et au final, on est moins efficace. » Selon elle, les trois quarts du personnel sont sous antidépresseurs et beaucoup ont déjà refusé des arrêts de travail par conscience professionnelle. Consciente du manque de personnel, la direction avance ses difficultés à recruter. « Nous avons recruté un cadre supérieur infirmier qui devrait arriver en avril, indiquait mardi Gilles Marcillaud, directeur adjoint de l'établissement. Deux infirmières diplômées nous rejoindront en avril et en juin, et un agent hospitalier doit arriver le 1 e r mars. Compte tenu de la conjoncture actuelle, il n'est pas facile de recruter immédiatement. » Des embauches au compte-gouttes qui ne répondent qu'en partie à la situation d'urgence décriée par les salariés, qui dénoncent par ailleurs une mauvaise organisation du service ainsi qu'un manque de matériel. Autant de questions auxquelles la direction se devra d'apporter des réponses lors du comité d'hygiène, de sécurité et de condition de travail exceptionnel qui doit se tenir le 5 mars prochain. D'ici là, pas question d'arrêter la grève.

 

* A leur demande, les prénoms des personnes ont été modifiés.

Sylvain Merle

Le Parisien , vendredi 27 février 2004